Les problèmes d’électricité sont de plus en plus pressants. Les batteries qui ne rechargent pas. Après un tour complet des appareillages, on s’est aperçu que c’était la pompe de cale qui fonctionnait en permanence. Fidèle à ses méthodes expéditives, le capitaine a carrément retiré la pompe et effectivement, les batteries maintenant se rechargent. Le même soir, on s’est aperçu que l’eau commençait à affleurer au plancher. Si la pompe de cale fonctionnait en permanence, ce n’était pas pour un problème de faux contact mais bien parce que le bateau prend l’eau...
Maintenant nous nous relayons toutes les deux heures pour pomper manuellement, en notant fréquence et quantité. Je croise les doigts pour que ce rapport reste constant, vu que nous sommes très exactement au milieu de nulle part et qu’il reste 2600 nautiques jusqu’aux Marquises. La seule terre émergée dans les environs est l’ilôt Clipperton, dont un ami skipper me parlait en plaisantant, en me disant que mes équipiers fatigués de moi allaient sans doute m’y débarquer. Une île déserte qu’une équipe scientifique visite régulièrement une fois tous les dix ans.
Last but not least, le groupe électrogène vient de lacher. Il faut barrer maintenant plusieurs heures par jour pour soulager la charge du pilote automatique. Plus aucune chance de recharger mon appareil photo et je n’utilise plus cet ordinateur que pour le traitement de texte. Bref, il reste à peu près trois semaines en mer; eau et électricité ne se distribuent plus qu’au compte goutte. Je dois négocier des heures de barre supplémentaires pour recharger mon ipad et pouvoir continuer à lire. Le capitaine est devenu le grand-prêtre de l’électricité et distribue des temps de chargement comme on donnerait des bons points. Il faut d’abord bien se comporter...